(dans la cour) #33 – Simone
Je fais partie des primo occupants. On a été nombreux à arriver ici jeunes et avoir des enfants qui sont nés ici. Nos enfants jouaient dans la cour tous ensemble. C’était un grand brassage, il y avait une grande mixité et une grande entraide dans cette cour.
Les enfants ont grandi, certains couples ont déménagé ou divorcé, la cour a été désaffectée.
Je ne suis pas venue dans la cour dès le début du confinement. En tant que senior on se sent un peu à l’écart, c’est plus difficile. À un moment j’ai ressenti le besoin de sauter le pas.
Je viens marcher un peu, parce que c’est quand même plus vaste que l’appartement, respirer un peu l’air, parce que c’est mieux qu’à la fenêtre, et voir des gens parce que je vis seule et il y a beau y avoir le téléphone c’est quand même beaucoup plus agréable de converser avec un humain en face de soi.
Je m’y sens en sécurité, en liberté. Aucune peur, aucun a priori. Au contraire : j’y vois des sourires, de la convivialité, de la vie.
Je ne sors en revanche pas du tout dans le quartier, juste pour faire le ravitaillement une fois tous les 8/10 jours et voir la maraîchère qui livre au pied de l’immeuble : ça, ça a été une initiative formidable!
Je fais partie d’un groupe de seniors de la Mutuelle de l’Éducation nationale, étant donné que nos activités n’ont pas lieu, j’ai eu beaucoup de contacts téléphoniques ou par WhatsApp avec d’autres retraitées, en général seules, parce que soit veuves, soit divorcées, peut-être moins curieuses que moi culturellement parlant, donc plus désœuvrées, qui maniaient peut-être moins bien que moi l’outil informatique.
Ce qui me manque le plus ce sont mes petits enfants dont je m’occupe beaucoup, puis le cinéma, le théâtre, les expos sachant qu’en période normale si je déjeune une fois à la maison par semaine c’est vraiment le maximum : je suis toujours par monts et par vaux.
Je me sens bien tout de même. Un peu déçue par la façon dont les médias ont traité cette crise, cette pandémie et un peu déçue par certaines réactions gouvernementales.
Simone, 75 ans.