L'inauguration de la plus grande exposition universelle jamais organisée aura lieu dans moins d'une semaine à quelques kilomètres de là.
En 2 décennies, Shanghai s'est totalement transformé. Les habitants de Shanghai ont vécu au rythme des chantiers, drainant des milliers d'ouvriers venus des campagnes pour répondre aux besoins de main d'œuvre.
Pendant les 6 mois que va durer l'exposition universelle, les chantiers vont se taire, les ouvriers seront déplacés loin du centre.
Des rues entières, ne correspondant plus à l'image moderne de Shanghai seront fermées. Les marchands ambulants seront chassés des rues où ils exercent. Shanghai doit être parfaite aux yeux du monde, aux yeux de la Chine et surpasser Pékin sa grande rivale, qui a réussi l'organisation des JO deux ans plus tôt.
La ville se transforme à une vitesse folle, impensable pour nous occidentaux. Il y a 20 ans, le quartier de Pudong et ses tours vertigineuses n'était qu'un gigantesque marais. Des quartiers-villes apparaissent, des centaines de kilomètres d'autoroutes urbaines se faufilent entre les immeubles, à des hauteurs vertigineuses.
La ville s'est résolument tournée vers le futur, le développement, la modernité, tournant ainsi le dos à son passé. Le lilong, regroupement de maisons autour d'une cour intérieure, était il y a quelques années encore le modèle d'habitation populaire le plus répandu à Shanghai, est en voie de disparition.
Les boutiques sur rue ou sur le trottoir dans lequel s'exerçait le commerce sont détruites. Quelques îlots subsistent mais ils ne sont plus entretenus. L'insalubrité gagne du terrain. Elle devient le prétexte à la démolition.
Le modèle est aujourd'hui la tour de logement haute de 30 à 40 étages, regroupée avec d'autres dans une enceinte sécurisée. Ces îlots déconnectés de la ville sont impossibles à traverser pour ceux qui n'habitent là.
Il s'agit d'une des manifestations les plus visibles d'une société en mutation, de la déshumanisation des mégapoles.
WAICANGQIAO STREET n'existera bientôt plus, elle fait déjà partie du passé. Quelques habitants resteront jusqu'à ce que les bulldozers ne les délogent.
Le hasard de mes déambulations, m'a amené dans ce petit bout de territoire, ce bref moment d'Histoire où tout bascule, le présent n'existe déjà plus.
Texte & Photographies Vincent Fillon - Droits réservés